Phycotoxines : les toxines lipophiles

Les différentes phycotoxines sont classées non pas par leur nature chimique mais par leur activité, selon les syndromes qu’elles provoquent

  • diarrhéiques, paralysantes, amnésiantes, neurologiques et ciguatériques

Contrairement aux autres familles, les toxines diarrhéiques (anciennement appelé DSP « Diarrheic shellfish poison ») font partie d’un ensemble de familles - regroupant les toxines classées diarrhéiques et certaines autres substances solubles dans les lipides - baptisé « toxines lipophiles ». En France, la principale toxine lipophile est l’acide okadaïque.

Dinophysis sp., produit des toxines lipophiles

Les épisodes de toxicité diarrhéique constituent en France, la majorité des contaminations de coquillages par des phycotoxines ces dix dernières années.

- Quels sont les facteurs qui favorisent et expliquent la présence de toxines lipophiles et les variations de son taux ?

Les toxines lipophiles sont, en France, associées majoritairement au genre phytoplanctonique Dinophysis . Dinophysis fait partie du phytoplancton à faible taux de développement : les coquillages peuvent devenir toxiques même quand Dinophysis est présent en très faible quantité dans l'eau -seuil d'alerte = 500 cellules/L (ou dès présence dans certaines régions).
La présence du Dinophysis est régulier au niveau du panache de la Seine. La zone d'Antifer apparaît comme une zone d'accumulation préférentielle de Dinophysis : ceci est expliqué en grande partie par la configuration du site, le régime des vents, les courants de marée résiduels ainsi que par les excellentes conditions de croissance fournies par le panache de dilution de la Seine (stratification, richesse nutritive).

La stratégie de surveillance Rephy consiste à rechercher systématiquement les toxines lipophiles dans les coquillages:

  •  des zones à risque et en période à risque, pour les zones de production et les gisements côtiers (ces zones et périodes à risque sont définies à partir des données historiques sur les trois années précédentes),
  • des zones de pêche : 1 mois et 15 jours avant l’ouverture, puis pendant toute la période de pêche.

- Quel est le seuil à partir duquel la zone est fermée ? Ce seuil est-il défini au niveau national ou européen ?

Le seuil pour les toxines lipophiles est défini au niveau européen par le Règlement 853/2004 du 29 avril 2004. Les toxines lipophiles comportent différents types de toxines, dont certaines sont réglementées et d'autres pas. Voici les seuils pour les toxines lipophiles réglementées :

  •  Acide okadaïque, dinophysistoxines et pecténotoxines pris ensemble : le seuil ne doit pas dépasser 160 μg d'équivalent acide okadaïque par kg de chair de coquillage.
  • Yessotoxines : le seuil ne doit pas dépasser 3.75 mg par kg de chair de coquillage.
  • Azaspiracides : le seuil ne doit pas dépasser 160 μg d'équivalent acide okadaïque par kg de chair de coquillage.

- Quels sont les effets de consommer une CSJ contaminée sur le consommateur ? quel risque encoure-t-il ?

NOTE D'INFORMATION DPMA/SDA/O2008-9601 du 12 mars 2008:
Les premiers cas d’intoxications gastro-intestinales liés à la consommation des coquillages contaminés par des dinoflagellés ont été observés aux Pays-Bas dans les années 60 mais en France, c’est en 1983 que les intoxications diarrhéiques ont été reliées aux efflorescences de dinoflagellés toxiques du genre Dinophysis. Elles ont provoqué, la même année, jusqu’à 3.300 cas de gastro-entérites en Bretagne sud. Ce sont ces événements qui ont d’ailleurs été à l’origine de la création du réseau de surveillance REPHY. Concernant les intoxications diarrhéiques par l’acide okadaïque et/ou les dinophysistoxines, les toxines modifient la perméabilité des vaisseaux du tube digestif et les symptômes d’intoxication apparaissent au bout de 30 minutes à 12 heures après consommation des coquillages contaminés. Les douleurs peuvent durer trois jours. Les symptômes essentiels sont des diarrhées, des nausées, des vomissements et des douleurs abdominales. Aucune mortalité humaine n’a été rapportée à ce jour. Les intoxications diarrhéiques par les azaspiracides répertoriées dans la littérature montrent un tableau clinique proche, avec des délais d’apparition entre 2,5 et 18h et des symptômes de nausées, vomissements,diarrhées importantes, douleurs épigastriques, céphalées et fièvre modérée. Le rétablissement intervient après 2 à 5 jours. De la même manière, aucune mortalité humaine n’a été rapportée à ce jour.

- Pourquoi n'y a t-il pas de protocole de décorticage possible en cas de DSP ?

Il n'y a pas eu de travail scientifique de collecte des données dans l'objectif d'une autorisation réglementaire d'une énucléation sanitaire, comme cela a été fait pour l'ASP. On peut imaginer que les toxines lipophiles se concentrent dans la glande digestive, mais cette hypothèse reste à vérifier, et les modalités d'une éventuelle énucléation restent à définir (quantité de toxines lipophiles à accepter dans la noix et la gonade pour une énucléation sûre). Une différence majeure est le caractère lipophiles, contrairement à l'ASP, et ces toxines ne se comportent peut être pas de la même manière dans le coquillage.

- Pourquoi, seul le laboratoire de Caen est il agréé au niveau de la façade pour les toxines lipophiles ? Pourquoi celui de Rouen ne l'est pas ?

La détection et quantification des toxines lipophiles est réalisée par analyse chimique (chromatographie liquide, spectrométrie de masse) depuis 2010, remplaçant un bio-essai utilisé auparavant.
Un appel à candidature a eu lieu en 2011 pour l'obtention de l'agrément toxines lipophiles. Le laboratoire de Rouen n'en a tout simplement pas fait la demande. C'est encore possible pour ce laboratoire de demander l'agrément : voir la note de service 2011-8165 du 12 juillet 2011, fixant les modalités de l'appel à candidature pour cet agrément.